Ô rage ! Le mal de l’homme
devenu loup
La rage est une zoonose, une maladie neurotrope commune à l’homme et à de très nombreux animaux vertébrés, qui atteint les cellules cérébrales et occasionne, si le virus parvient jusqu’au cerveau, une méningo-encéphalite jugée irréversible lorsqu’on se limite aux moyens conventionnels de traitement.
La mort survient en principe entre une et trois semaines après le début des symptômes, eux-mêmes apparaissant en moyenne trois semaines après la morsure ou la griffure infectante. Classiquement, le premier signe est une “modification de l’humeur”, terme assez vague mais actuellement très à la mode, et qui signifie que l’individu se comporte de manière inhabituelle et asociale, manifeste de l’angoisse et des phobies très particulières, ici une aversion prononcée pour l’eau et les courants d’air. Plus tard peut apparaître cette agressivité sans raison apparente,
déroutante de la part de compagnons domestiques, inhabituelle de la part d’animaux sauvages qui viennent à l’homme pour l’agresser au lieu de l’éviter comme à leur habitude.
Auparavant, on pourra observer des accès de fièvre, des tremblements, une hypersensibilité avec spasmes et contractures à la moindre sollicitation neurosensorielle. La voix se modifie et la salivation devient intense... Imaginons la suite : une bave abon-dante inonde la bouche, déborde d’entre les lèvres retroussées par le spasme, et s’écoule irrépressiblement sur le menton... Voici une parfaite description de la métamorphose de l’homme en loup, telle que la décrit depuis l’aube du monde la légende du garou. Terrifiant destin que ce retour aux abîmes du chaos originel !
Puis vient la maladie nerveuse proprement dite, particulièrement éprouvante, associée à des “troubles de la conscience”, cette conscience qui éclaire et guide notre humanité et dont la perte se traduit par cette régression vers une ténébreuse animalité dominée par l’instinct.
La maladie nerveuse se traduit parfois par une paralysie flasque et un coma très rapide, mais dans d’autres cas se produit un état d’excitation furieuse au cours duquel l’individu atteint peut se livrer à des actes incontrôlés de violence tels que les fameuses morsures et griffures furieuses qui précèdent de peu la mort.
Comme nous l’avons suggéré, cette violente agitation avec perte de la lucidité et du contrôle volontaire correspond à une perte d’identité, à un effondrement psychotique qui est certainement LA peur la plus intime de chaque être humain.
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