jeudi 29 août 2013

Endocardite infectieuse


Endocardite infectieuse
Dr Matta Matta, Pr Jean-Luc Mainardi

L’endocardite infectieuse (EI) est une

maladie infectieuse sévère et létale en

l’absence d’antibiothérapie efficace et

prolongée avec ou sans chirurgie adjuvante.

Elle reste néanmoins une pathologie peu fréquente en France,

avec une incidence de 31 cas/an/million d’habitants. Cette fréquence

est restée stable durant les dernières années malgré une

amélioration de la prise en charge, notamment l’antibioprophylaxie

pour les gestes à risque, car, parallèlement à la disparition

des valvulopathies post-rhumatismales, on note une augmentation

des autres facteurs de risque. Ainsi l’augmentation du nombre

des prothèses valvulaires et des dispositifs intracardiaques, le

vieillissement de la population avec augmentation des valvulopathies

dégénératives, ont contribué à la majoration de la fréquence

de l’endocardite chez des personnes maintenant plus âgées.

Parallèlement à la modification de la population susceptible de

développer une EI, on note également une modification des germes

responsables. Ainsi on assiste à une augmentation de la fréquence

de certains streptocoques commeS. gallolyticus sub spp.gallolyticus

(anciennement appelé S. bovis), actuellement premier germe en

France en termes de fréquence (tableau 1), du staphylocoque,

surtout S. aureus, et à la découverte du rôle joué par les bactéries

intracellulaires telles que Coxiella burnetii et Bartonella spp.

De nouveaux pathogènes,Tropheryma whipplei par exemple, ont

été découverts comme également responsables d’endocardite

grâce à l’utilisation de nouveaux moyens diagnostiques tels que

les outils de biologie moléculaire, en particulier l’amplification et

le séquençage du gène codant pour l’ARN 16S ribosomal.

PHYSIOPATHOLOGIE

Trois étapes interviennent dans le développement de l’EI.

✓ Lors d’une première étape, on assiste à un dépôt de fibrine et

plaquettes sur l’endothélium valvulaire facilité par des lésions

endothéliales préexistantes.


✓ La deuxième étape comprend la greffe des bactéries, à la suite

d’une bactériémie transitoire, favorisée par les adhésines bactériennes,

notamment les MSCRAMMS (pour microbial surface

component reacting with adhesive matrix molecules).

✓ La troisième étape consiste en une survie et une multiplication

des bactéries, malgré les mécanismes de défense de l’hôte, leur

dissémination causant une extension locale de l’infection avec

apparition d’abcès ainsi qu’une insuffisance cardiaque par destruction

valvulaire. De plus, la végétation peut se fragmenter,

responsable d’emboles septiques ou non septiques. Durant cette

étape, on a également un essaimage des bactéries, avec apparitions

de foyers septiques secondaires et un largage d’antigènes avec

apparition de phénomènes de vascularite à la suite de la formation

de complexes immuns circulants.

DIAGNOSTIC

Habituellement, le diagnostic de l’EI reposait sur la persistance

d’hémocultures positives et la présence de lésions histologiques

des valves atteintes. Cependant, en 1994, une nouvelle classification

des endocardites fondée sur des critères cliniques, bactériologiques

et échographiques a été proposée par l’université de Duke. Ces

critères ont été modifiés en 2000 et sont actuellement adaptés

sous le nom de critères de Duke modifiés (encadré). Une endocardite

est dite certaine si on a 2 critères majeurs ; ou 1 critère majeur

et 3 mineurs ; ou 5 critères mineurs. Elle est dite possible si on a

un critère majeur et un critère mineur ou 3 critères mineurs.

Clinique

Bien que l’EI soit une atteinte infectieuse du coeur et plus précisément

de ses valves, elle se manifeste souvent par des signes

cliniques divers et variés nécessitant un examen clinique complet.


✓ Sur le plan général, la prise des constantes vitales doit être

systématique.

✓ Sur le plan cardiologique, il convient de rechercher à l’auscultation

l’apparition d’un nouveau souffle (critère majeur de Duke) et à un

degré moindre une modification d’un souffle connu. La recherche

de signes en faveur d’une insuffisance cardiaque, tels que l’apparition

d’une orthopnée ou d’une turgescence jugulaire, est également

essentielle, car la présence de cette dernière change la prise

en charge thérapeutique.

✓ Sur le plan systémique, il faudra dépister la présence de signes

neurologiques évocateurs d’un accident vasculaire cérébral postembolique

ou hémorragique. La palpation abdominale doit

rechercher une hépatosplénomégalie. L’examen cutané a un intérêt

double : la recherche de signes en faveur de l’EI, et la recherche

d’une porte d’entrée. Parmi les signes cutanés en faveur de l’EI,

on note les faux panaris d’Osler et les taches de Janeway.

✓ Les portes d’entrée à rechercher sont un éventuel foyer dentaire,

des traces d’injection intraveineuse, de furonculose importante,

d’abcès cutanés ou de signes urinaires.

✓ Le reste de l’examen clinique permet par l’examen ophtalmologique

de rechercher une hémorragie sous-conjonctivale, de

rechercher une arthrite ou une spondylodiscite et d’éliminer des

emboles septiques au niveau des membres par une palpation

des pouls périphériques.





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